Jour après Jour

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Lundi 17 avril 1 17 /04 /Avr 00:31
I

 

Je venais à peine de m'éveiller d'un rêve étrange. Le ciel se mélangeait encore à la fumée des usines en face et mes pieds étaient engourdis par le froid piquant de décembre. Tout m'était tombé dessus comme une fatalité, plus un rond en poche, l'Europe avait fait faillite, j'avais perdu mon emploi et encore pris des kilos.

Le rêve était toujours présent. Bas-reliefs à Angkor-Vat. Des corps enlacés dans d'improbables positions. Le Kama Sutra de mon inconscient me mènerait à ma perte une fois de plus. Le sexe mon moteur.

J'avais glissé une main sous la serviette de mon dernier client, d'un massage à une branlette, il avait porté plainte à ma patronne. Le salaud m'avait quand même poissé les doigts dans un soupir de soulagement.

Pourquoi est-ce que les histoires d’amour des autres prennent cette consistance de roman de gare que les miennes n’ont pas? Je jalouse tous ces couples si lisses et prévisibles.

Et moi je traînais dans les rues à la recherche de portes cochères, reniflant dans les coins à l’affût d’une odeur de sexe. Ce fumet piquant que laissent les corps quand ils n’y a plus rien d’autre.

La nuit, je traquais les couples, me nourrissant de gémissements et de morceaux de corps à peine entraperçus dans la pénombre d’un renfoncement granitique. Quand les reins se heurtent à la rambarde d’acier d’un escalier de vieil immeuble, quand le lisse d’une peau se charge de l’odeur d’urine d’une arrière cours humide... Alors le bruit des téléviseurs s’accroche à la lumière bleutée, surprenant le chaos de la chair, le parant de bijoux cathodiques.

Il m’était arrivé de lécher la pierre, quand la sueur l’imbibait, et que l’empreinte, encore chaude, d’un cul m’envoyait des frissons dans le bas-ventre.

Je désirais ces femmes qui avaient su séduire sans conséquences. Je rêvais de glisser ma main entre leurs cuisses, là où la peau si douce garde l’odeur des caresses des autres.

Je me collais alors, de tout mon long, sur la façade rugueuse, et m’imaginais clouant ma femelle sous mes coups de reins. Et le plaisir venait, violent, creusant mon ventre de spasmes. Assassine, l’onde brûlante, rapide, qui me foudroyait et me laissait pantelante. Pathétique.

Je ne voulais plus de ces pulsions, je volais le sexe des autres. Je voulais mon plaisir. Avec Dorota, si douce, si chienne.

Je suis la pierre sous l’étreinte des racines du banian. Je suis la mémoire de granit. L’Apsara sacrée aux seins ronds et froids qui dansait pour un roi. Immortelle, ancrée dans la mémoire végétale depuis des centaines d’années, putain du temps qui passe.

Je suis l’ombre des autres, me glissant serpentine, sous les passions, pour sucer leurs désirs. Je n’ai pas honte de la froideur avec laquelle je collectionne les images et les instants. Ils me nourrissent, ils sont ma vie.

Dorota, sorcière, Baba-Yaga qui m’a volé mon âme et l’a cloué au soleil jusqu’à ce qu’elle redevienne poussière

-         Viens içi, donnes moi ta main, tu sens ce que tu me fais ? 

Elle a glissé mes doigts en elle, ma main dans son jean

-         Salope…

-         Oui ? tu es sûre ?

La seule qui ne me donne d’elle que ce que je ne veux pas. Et moi je suis faible.

 

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Par The Core - Publié dans : nouvelles & textes
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